Chroniques d’un anthropologue au Japon (72)

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Chroniques de l’ordinaire bordelais. Episode 442

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« Dieu est une femme », film d’Andrés Peyrot (2023)

« Dieu est une femme » est un film intéressant à bien des égards pour les anthropologues. Réalisé par le Suisso-Panaméen Andrès Peyrot, il relate la quête des Kunas de l’île d’Ustupu (Panama) qui souhaitent récupérer « leur » film, tourné en 1975 par le journaliste-explorateur français Pierre-Dominique Gaisseau1. Celui-ci a vécu pendant un an avec sa femme et sa fille chez les Kunas mais pour des raisons financières, le film n’est pas sorti et a été confisqué par la banque. Les Kunas le présentent comme quelqu’un de sympathique et se sont particulièrement attachés à sa fille de 4 ans Akiko. S’ils ne manifestent pas d’hostilité à son égard, les Kunas considèrent cependant, 50 ans plus tard, qu’on leur a volé « leur » film.

On manque d’informations quant à la genèse du film et au réalisateur, les informations sur les protagonistes, Arysteides Turpana et Orgun Wagua sont lacunaires. Qui sont-ils réellement ? Quels sont leurs parcours ? On comprend qu’ils ont participé de près au film. (On peut lire l’entretien2 avec le réalisateur pour en apprendre plus.)

L’intérêt du film repose sur le regard critique que portent les Kunas sur Gaisseau pendant qu’il réalisait son documentaire puis lors de la projection un demi-siècle plus tard mais aussi sur la réception de « leur » film, la manière dont ils se le réapproprient.

Turpana qui assistait Gaisseau lors du tournage explique qu’il était convaincu que les Kunas étaient une société matriarcale. Turpana avait beau lui montrer que le « congrès » était plein d’hommes, il ne changeait pas d’avis. Il relate encore l’épisode d’une cérémonie où des femmes avaient des calebasses, d’autres des contenants en plastique. Il avait violemment expulsé les secondes du champ. Lors d’une discussion avec son assistant, il lui avait expliqué que les Européens allaient ne pas le considérer comme crédible s’ils voyaient du plastique, preuve qu’il n’avait pas filmé une « vraie tribu authentique ».

Après la projection, puisque une copie du film a été retrouvée à Paris, la critique est plus acerbe : le film a été fait pour les étrangers, le commentaire n’exprime que ce que pensait le réalisateur, soit une vision anthropologique des peuples autochtones perçus comme exotiques, discours des années 70 qui a encore cours aujourd’hui, la valorisation d’un regard distant. Leur agacement envers la voix off les a même conduits à ne plus l’écouter pour se concentrer sur les images.

La manière dont les Kunas discutent après la projection révèle différentes dimensions. S’il y a un aspect affectif et émotionnel – revoir des personnes disparues, se revoir 50 ans plus tard, l’aspect politique prend vite le dessus. « C’est comme un cri de nos anciens ! » Sont questionnés les ravages produits par l’éducation qui a fait croire qu’il n’y avait qu’une éducation possible : l’éducation occidentale. L’abandon de certaines cultures est remis en cause, avec le passage d’une auto-suffisance à une dépendance alimentaire. Un protagoniste critique vivement le financement de musées pour les touristes. Le film laisse donc s’exprimer tout un questionnement sur le présent et l’avenir des Kunas.

La réappropriation va jusqu’à l’expulsion totale en quelque sorte de Gaisseau. La caméra qu’il avait utilisée a été retrouvée et est essayée par plusieurs personnes. C’est Duren Wagua, fils d’Organ, jeune cinéaste, qui synthétise  l’interrogation : « Comment les autres nous voient, comment nous voyons-nous et comment aimerions-nous être vus ? » Ce final avec des cinéastes autochtones marque la réussite d’Andrés Peyrot, la réparation de l’échec de Gaisseau pourrait-on dire : ce deuxième film est fait pour et par les Kunas, produit de la réflexivité engendrée par le premier. On comprend mieux le manque d’informations constaté au début de ce compte-rendu. Elles étaient inutiles aux Kunas.

Colette Milhé

1Pierre-Dominique Gaisseau, né le 10 mars 1923 à Charleville-Mézières et mort le 22 octobre 1997 à Paris, est un explorateur et documentariste français. En 1962, il a gagné l’Oscar du meilleur film documentaire pour Le Ciel et la Boue.

2https://www.troiscouleurs.fr/article/andres-peyrot-pour-les-kunas-cest-devenu-une-lutte

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